Le poids des immatriculations tactiques sur les chiffres du marché automobile

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Les concessionnaires et les constructeurs jouent-ils sur leurs statistiques de vente pour respecter leur quota annuel de CO2 ? Une analyse rapide des immatriculations de voitures électriques et hybrides en janvier et février donne la réponse. Les chiffres montrent surtout l’ampleur de cette pratique, loin d’être illégale en France et en Europe.

Les constructeurs automobiles sont tenus depuis quelques années de respecter un plafond d’émissions de CO2 pour l’ensemble de leur catalogue. Cette obligation les pousse à investir plus ou moins massivement dans des modèles moins énergivores, donc moins dépendants des énergies fossiles.

Cette contrainte explique en partie l’essor croissant des voitures hybrides et électriques. Les faits révèlent également que les marques et les concessionnaires n’hésitent pas à embellir quelque peu leurs chiffres de vente, en usant des immatriculations « tactiques ». Cette pratique assez répandue sert les intérêts des producteurs, mais rajoute en même temps une pression supplémentaire sur les réseaux de distributeurs.

Un levier facile à activer et bénéfique pour les acheteurs

L’immatriculation « tactique » est une opération couramment employée par les concessions et les constructeurs, surtout en période de crise. On estime qu’elle concerne jusqu’à 15 à 20 % des ventes mensuelles de véhicule particulier ou voiture de fonction des marques implantées sur le marché français.

La logique veut que plus le secteur automobile est en crise, plus le recours à cette tactique est important. Les chiffres de 2020, année particulièrement difficile pour les marques, le prouvent. Cette pratique se manifeste à travers des ventes plus élevées que d’habitude à des institutions ou des sociétés de location. C’est le cas, par exemple, de Peugeot, qui a vendu fin 2019 1000 véhicules tout électriques à Engie Solutions, dont la moitié est constituée de la nouvelle citadine e-208.

En plus d’aider le constructeur à respecter ses engagements CO2, cette technique profite également aux acheteurs, qui obtiennent des prix bas de la part des distributeurs. Un avantage qui trouve son origine dans le fonctionnement même de l’immatriculation tactique.

Une pression supplémentaire sur la rentabilité des distributeurs

Les chiffres de vente en électrique et hybride de décembre 2020 et janvier 2021 attirent l’attention sur l’ampleur des immatriculations tactiques en France. De 20 000 exemplaires à la fin de l’année, les immatriculations dans ces segments sont tombées à 6471 unités.

Comment expliquer cette grande différence ? Afin de se conformer à leur quota de CO2, les constructeurs accélèrent l’immatriculation de modèles à faible ou zéro émission en fin d’année. Sauf que ces véhicules ne sont pas tous vendus à des clients finaux. Les concessionnaires se chargent d’acquérir les automobiles et de les immatriculer, par le biais d’une compagnie de location montée spécialement pour ce genre d’opération.

Ces voitures neuves sont donc comptabilisées en stock. Elles commencent à être décotées, puisqu’elles sont immatriculées même si elles ont peu, voire aucun, kilomètre au compteur. Le distributeur doit les vendre le plus rapidement possible, en faisant appel à des offres promotionnelles ou à des journées portes ouvertes. Souvent, il se trouve dans l’obligation de casser les prix pour ne pas essuyer de pertes, même si cela pèse sur la rentabilité.

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