Les leveraged loans pourraient entraîner une nouvelle crise financière

Crise économique financiere et d’affaires de fond

Les leveraged loans, ou prêts à effet de levier, ont connu un développement exponentiel ces dernières années, notamment aux États-Unis. Les entreprises tout comme les investisseurs sont séduits et maintiennent ce type de crédit accordé aux structures fortement endettées. Le montant de l’encours de dette augmente ainsi, et avec lui, le risque de crise.

Les offres de prêts à effet de levier continuent de se développer, voyant la participation de plusieurs acteurs. D’un côté, les investisseurs non bancaires, proposant le leveraged loan institutionnel, et de l’autre, les établissements bancaires, mettant avant le leveraged loan non institutionnel. Fin 2018, les encours de prêts à effet de levier se sont élevés à près de plus de 1 800 milliards de dollars aux États-Unis, soit trois quarts de l’encours mondial.

Pour les entreprises endettées, ce prêt leur donne un moyen de redresser leur activité et d’échapper à une liquidation judiciaire. N’expose-t-il pas cependant les pays pratiquants à une nouvelle crise financière ? Quel avenir pourrait-il avoir ?

Un marché à risque

Accorder un prêt à une entreprise qui enregistre un encours de dette équivalent à près de quatre fois son bénéfice annuel permet-il réellement d’aider celle-ci à relancer ses activités ? Pour les acteurs du prêt à effet de levier, ceci est possible.

Néanmoins, le fonctionnement même de ce prêt soulève des inquiétudes. D’abord, parce que les entreprises emprunteuses, déjà fortement endettées, se servent de leurs prêts, non pas pour soutenir des investissements qui augmentent leur rentabilité, mais pour payer des dividendes, racheter des actions ou réaliser des fusions et des acquisitions.

Les risques soulevés par une instabilité des prix et de la gestion des politiques macroéconomiques ne sont pas non plus à négliger. Les financements peuvent, en conséquence, devenir plus rares et le coût de la dette peut augmenter. Au lieu de pouvoir se redresser, l’entreprise emprunteuse peut faire face à une nouvelle crise susceptible d’engendrer la liquidation plus tôt que prévu.

Une crise imminente ?

Au vu des risques, le développement de ce crédit professionnel ne va donc pas sans rappeler la crise financière provoquée par les subprimes en 2008. En effet, avec le leveraged loan, tout comme ce qui était le cas avec les subprimes, les débiteurs connaissent rapidement des difficultés à s’acquitter de leurs dettes. En 2008, les institutions américaines ont dû faire face à 1 100 milliards de dollars de dettes.

Aux États-Unis, la situation actuelle n’en est pas loin pour les leveraged loans, avec 1 200 milliards de dollars d’encours pour les prêts institutionnels et 600 milliards de dollars pour les prêts non institutionnels. Bien entendu, les retards de paiement qui s’accumulent rendent difficile, voire impossible, tout redressement au niveau des établissements prêteurs.

D’ailleurs, les États-Unis connaissent déjà une détérioration de la qualité du portefeuille de crédits. La part des prêts institutionnels hautement spéculatifs est notamment passée de 30 % en 2007 à 54 % en 2018.

Les chocs macroéconomiques et financiers étant bel et bien possibles, le risque de défaillance est élevé pour les entreprises emprunteuses. Et bien évidemment, elles vont entraîner les institutions prêteuses dans leur chute.

Un marché fructueux pour les investisseurs

La faible implication des établissements bancaires pourrait néanmoins être rassurante. En effet, les prêts sont en grande partie accordés par des investisseurs non bancaires, sous forme d’obligations adossées à des emprunts (CLO - Collatorized loan obligation), de fonds d’investissement, de fonds de pension ou de fonds spéculatifs. Si ceux-ci proposent davantage des leveraged loans, c’est parce que leur rendement est plus élevé.

Du côté des entreprises emprunteuses, le recours aux prêts à effet de levier offre une alternative aux dettes obligataires, qu’elles peuvent difficilement émettre. Ainsi, malgré les risques, le leveraged loan est en plein essor aux États-Unis durant ces cinq dernières années, encouragé par le resserrement monétaire en 2015 et le taux d’intérêt relativement plus bas.

Par ailleurs, les règles sont claires en cas de liquidation : il faut privilégier les établissements prêteurs avant de rembourser les autres investisseurs, tels que les détenteurs d’obligations.

Retour au de page