Le canal étonnant du crowdfunding pour la vente de montres de luxe

 Montre de luxe

Ces derniers mois, les campagnes de crowdfunding horloger se multiplient sur la plateforme Kickstarter. Ces jeunes marques de montres misent sur la carte de l’originalité et de la qualité.

Le crowdfunding horloger, un succès surprenant

La marque Filippo Loreti fut le premier à se lancer sur ce créneau en 2015, aux États-Unis. Elle était parvenue à clôturer une levée de fonds de 1 million de dollars sur Kickstarter pour financer la production de sa première collection de montres.

Pour 200 dollars, la marque s’est engagée à offrir à ses donateurs une montre d’une qualité équivalente à celles vendues à 1000 dollars. Elle réédite son succès en 2016, et parvient cette fois à récolter 5 millions de dollars. Et rebelotte, cette année encore, en seulement 8 jours de campagne, la marque a reçu 2,7 millions de dollars.

Ce succès fulgurant a rapidement fait d’inspirer d’autres marques à surfer sur la vague du crowdfunding horloger. C’est le cas par exemple de Guillaume Laidet, qui a eu l’idée de rééditer d’anciens chronographes suisses, sous la désignation William L. 1985.

Pour mener à bien son projet, il ne lui a fallu que quelques semaines pour collecter 191 961 euros. Résultat : l’esthétisme des montres était certes séduisant, mais la qualité n’a pas été au rendez-vous. Ces dernières ont été produites à la chaîne en Chine, dans les usines de Shenzhen.

Alors que les acquéreurs ont dû payer 169 euros en moyenne, leur coût de revient, fret inclus, ne dépasse pas une dizaine d’euros. Un résultat décevant donc pour les internautes, et surtout très cher. En effet, pour le prix, ils auraient pu s’offrir une Tissot ou une Seiko, des marques authentiques.

Des exemples de projet à succès

Du coup, pour tirer profit du crowdfunding afin de vendre des montres, les apprentis maîtres-horlogers doivent désormais miser sur la qualité. Et les arguments ne manquent pas : à partir de 320 euros par exemple, les internautes peuvent s’offrir des montres au design inspiré du style des années 1940 « assemblées en France » chez Baltic Watches (mais comprenant des composants japonais ou chinois).

Ou encore, pour 500 euros, il est possible de commander une montre de luxe, entièrement customisable chez Code 41 (mais avec des composants suisse ou japonais). Ce dernier projet a fait l’objet d’une campagne de crowdfunding sur Kickstarter en novembre 2016.

Il n’a fallu à ses créateurs que quelques mois pour vendre l’intégralité de la production qui compte 2200 montres. D’ailleurs, ces derniers comptent bien lancer d’autres campagnes pour l’année 2018, en février et mai.

Avec un argumentaire de choc, spécialement conçu pour cette nouvelle forme de distribution, à savoir la précommande et la vente en direct sur internet : une livraison offerte, deux ans de garantie, et la possibilité de renvoyer gratuitement le produit, sans avoir à fournir de justifications, pendant 30 jours. En cas de panne ou de problèmes, l’envoi au service après-vente est également gratuit.

Autre projet à succès, celui de Clément Gaud, père de la marque « Laventure ». Le designer horloger a lancé trois séries limitées de montres marines, de 50 pièces chacune. Après avoir investi 15 000 euros pour la réalisation des trois prototypes, il a fallu à l’horloger moins de quatre jours pour collecter les fonds nécessaires à la production (175 000 euros).

Chaque montre est numérotée de 1 à 50. Elles sont toutes assemblées à la main dans la plus pure tradition horlogère suisse, ce qui explique leur coût unitaire de 1 600 euros. Sur Kickstarter, un projet à un tel niveau de prix est difficilement envisageable sans une réelle expertise

Ce qu’il maîtrise bien après avoir travaillé pour Mido, Audemars Piguet, ou encore Jacob&Co. pendant cinq ans. Le style rappelle certes des modèles connus comme la Patek Philippe Nautilus, avec un cadran sandwich qui fait référence aux premières Panerai Marina et Rolex Submariner, mais le créateur y voit surtout un hommage. Pour lui,

Fabriquer une montre, c’est rarement tout réinventer. Et surtout, c’est s’inscrire dans une lignée. En faisant des montres de petite série par crowdfunding, j’ai attiré des collectionneurs et des amateurs au budget serré en France, aux USA, en Suisse…

Fort de son succès, Clément Gaud compte bien poursuivre son chemin au-delà du financement participatif.

Le projet m’a pris un an et m’a rapporté peu (environ 10 000 euros) et j’ai vendu toute ma production. Je ne deviendrai pas millionnaire en fabriquant des montres, mais je vais continuer. Le crowdfunding m’a permis de me constituer un bon fichier de clients et de prospects, maintenant, je vais faire un site de vente en direct. Pour gagner ma vie, je vais sans doute devoir augmenter les séries à 100 exemplaires au lieu de 50, mais je veux conserver cet artisanat et chaque année proposer une montre différente

Clément Gaud.

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