Depuis le rachat de l’usine de thé, il y a trois ans, les salariés de Scop-TI, ex-Fralib, s’efforcent tant bien que mal de se positionner aux côtés des géants du secteur. Surtout qu’ils ont dû se défaire de la marque Eléphant.
En 2010, l’usine Fralib de Gémenos a chaviré après la décision d’Unilever, le géant de l’agroalimentaire et propriétaire du site, de délocaliser la production d’infusions et de thés, distribués sous la marque Eléphant, en Pologne.
Et ce, bien que l’usine soit économiquement bien portante. Il s’en est suivi 1336 jours de lutte sociale, d’occupation d’usine, d’actions en justice et de négociations avec les autorités pour arriver à la création, en 2014, de la coopérative Scop-TI. 58 ex-Fralib s’y investissent, dont 41 travaillent sur place.
Aujourd’hui, les machines ronronnent à nouveau entre les murs de l’usine, établie à 25 km de Marseille. La coopérative produit deux marques de thés : « Bio Scop-TI » et « 1336 » en mémoire du nombre de jours de lutte, et fournit les grandes surfaces qui distribuent sous leur propre marque.
L’usine produit chaque année 185 tonnes de thé pour un chiffre d’affaires de 1,6 million d’euros en 2016.
On a déjà atteint ce chiffre [pour 2017] alors qu’il nous reste quatre mois d’hiver, les plus propices sur le marché des boissons chaudes. On espère atteindre les 3 millions d’euros à la fin de l’année
Gérard Cazorla, membre élu du comité de pilotage de la scop-TI.
Le démarrage est certes prometteur, mais il demeure fragile. Pour atteindre l’équilibre financier, la scop-TI envisage de mettre en place une campagne de sociofinancement. Selon Gérard Cazorla,
Notre lutte contre Unilever, on l’a gagnée et on ne pourra pas nous l’enlever. Mais nous sommes aujourd’hui confrontés à un nouveau combat, celui pour la pérennité de la scop. Et c’est le plus difficile à gagner, parce que nous ne sommes pas sur notre terrain….
Gérard Cazorla
Car sur le marché, il faut s’adapter aux lois du capitalisme : les géants du secteur, dont Unilever, accaparent 85 % du marché du thé et des infusions. Cela se voit dans les rayons des supermarchés où Scop-TI s’efforce de se faire une place et d’acquérir un nom. D’après les explications de l’ex-syndicaliste,
Sans la marque Eléphant qu’Unilever a refusé de nous laisser, il a fallu repartir de zéro. Même si ce que l’on a fait est énorme, il faut dix ans pour se faire une notoriété en France.
Quoi qu’il en soit, Scop-TI a déjà réalisé un beau parcours. Ses marques sont présentes dans de nombreuses enseignes du Sud, et se construit peu à peu un nom en région parisienne. La coopérative est même parvenue à obtenir un référencement national à Auchan. Ses produits bio seront prochainement distribués par les enseignes Biocoop.
Avec une production maison de 35 tonnes par an, ce sont principalement les produits vendus sous marque distributeur qui permet à Scop-TI de réaliser du chiffre. S’exprimant sur ce plan, Gérard Cazorla souligne que,
l’accueil est bon, mais on est à 20 % de la capacité de production de l’usine, la marge de progression est donc forte.
Gérard Cazorla
Scop-TI a besoin de trésorerie pour partir à la conquête de nouveaux marchés. Raison pour laquelle la coopérative se lance dans une campagne de financement participatif.
En la matière, les besoins sont estimés à 700 000 euros. Pour renflouer ses caisses, la coopérative a également mis en œuvre une série de mesures, dont le déploiement d’un site e-commerce en complément du circuit de distribution traditionnel, la renégociation du loyer de l’usine qui appartient à la Métropole Aix-Marseille-Provence, l’activité partielle pour les salariés, et l’application de la mention « Garanti sans arômes artificiels » sur les boîtes de thé…
On a aussi mis sur pied un système d’afacturation avec les banques, qui nous font une avance de trésorerie quand on signe des contrats. On discute aussi pour obtenir des prêts, mais les banques sont encore un peu frileuses. Normal, on a deux exercices négatifs…
Gérard Cazorla